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dimanche 4 novembre 2018

LE MONDE TEL QU’IL EST.


Dans le monde entier, les êtres humains sont plus ou moins en voie de dégénérescence.
Quand le plaisir, qu’il soit personnel ou collectif, devient l’intérêt dominant de la vie - plaisir du sexe, plaisir d’affirmer sa propre volonté, plaisir de l’agitation, plaisir de l’intérêt égocentrique, plaisir du pouvoir et de la position sociale, exigence impérieuse de satisfaire son propre plaisir - il y a dégénérescence. Lorsque les relations humaines deviennent contingentes, basées sur le plaisir, il y a dégénérescence. Quand la responsabilité a perdu tout son sens, quand on n’est plus attentif aux autres ou aux choses de la Terre et de la mer, ce dédain du ciel et de la terre est une autre forme de dégénérescence. Lorsque l’hypocrisie règne en haut lieu et la malhonnêteté dans le commerce, quand le mensonge fait partie des propos quotidiens, quand il y a tyrannie d’une minorité, quand seules les choses, les objets prédominent — toute la vie est trahie. Tuer devient alors le seul langage de la vie. Quand l’amour est assimilé au plaisir, alors l’homme s’est coupé de la beauté de la vie et de son caractère sacré.
Le plaisir est toujours quelque chose de personnel, un processus qui isole. On pense que le plaisir est une chose que l’on partage, mais en fait, la satisfaction du plaisir est une démarche de l’ego, du moi qui emprisonne et isole. Plus grand est le plaisir, plus le moi est fortifié. Dans la recherche du plaisir, les êtres humains s’exploitent mutuellement. Quand, dans notre vie, le plaisir prend la première place, la relation est exploitée à cette fin, si bien qu’il n’y a pas une réelle relation avec les autres. Alors la relation devient une marchandise. Le besoin de s’accomplir est basé sur le plaisir et, lorsque celui-ci est refusé ou n’a pas trouvé de moyen d’expression, alors il y a colère, cynisme, haine ou amertume. Cette recherche incessante du plaisir est en fait de la démence.
Tout cela n’indique-t-il pas que l’homme, en dépit de son vaste savoir, de ses extraordinaires capacités, en dépit de son énergie dynamique, de son action agressive, est sur le déclin ? Cet égocentrisme calculé, avec ses craintes, ses plaisirs et ses anxiétés, apparaît d’une manière évidente partout dans le monde.
Krishnamurti